23 février 2013
LETTRE OUVERTE
A
- MONSIEUR LE MINISTRE DES RELATIONS EXTERIEURES
- MONSIEUR LE MINISTRE DE LA JUSTICE
DE L’UNION DES COMORES.
Messieurs les Ministres,
Notre justice connait depuis quelques mois déjà une agitation extraordinaire au sens propre du mot.
Le 6 décembre 2012, un substitut du
Procureur de la République du parquet de Moroni s’est permis de décerner
mandat de dépôt contre un avocat qui n’a fait que son
devoir d’assister ses clients ; qui pis est, l’incarcération s’est
déroulée en violation de toutes les règles de la procédure, comme l’ont
démontré à la barre tous les avocats du
barreau de Moroni, unis autour de leur confrère.
L’audience plutôt kafkaïenne s’est pourtant achevée sur une condamnation lourde de…6 mois d’emprisonnement !!!
Quelques semaines après, le 20
février 2013, ce fut le tour des jeunes magistrats de déclencher un
mouvement de grève pour protester contre l’arbitraire et la
gabegie dans l’administration judiciaire, et partout dans la presse
internationale, ce jugement sans appel : « la justice comorienne n’est plus
crédible ! »
Malheureusement, Monsieur le Ministre, aucun juriste, à moins d’être flagorneur ou partisan, ne saurait dire le contraire.
J’en veux pour preuve
l’incroyable collaboration que vous voulez imposer aux juridictions
comoriennes avec l’occupant de l’île comorienne de
Mayotte.
Il semblerait en effet que les autorités judiciaires de l’occupant entendent arrêter « l’immigration
clandestine » en associant
nos juges dans la besogne et ils n’ont trouvé rien de mieux que
d’ouvrir en zone occupée une information judiciaire confiée au juge
BOEHRER, qui a immédiatement saisi d’une commission rogatoire
internationale les juges comoriens se trouvant en zone libérée.
Le crime reproché aux mis en
examen par le juge BOEHRER c’est d’avoir essayé de se rendre d’un point
du territoire comorien (Anjouan) à un autre point
(Mayotte.)
Cette commission rogatoire « internationale » a été adressée
au Ministre comorien des relations extérieures par l’autorité
occupant l’île comorienne de Mayotte pour être exécutée par le
Ministre comorien de la Justice.
Traduit en langage simple,
cela veut dire que l’autorité qui occupe une partie de notre territoire
(Mayotte) vous demande de reconnaître que cette partie du
territoire lui appartient définitivement, relève de sa nation, (la
France) et que vous acceptez que les Comores n’ont que trois pattes
comme dirait feu le Président ABDALLAH.
Exécuter cette commission, c’est accepter la sécession.
Evidemment, dans un pays où la
justice n’est pas malade, cette commission serait tout simplement jetée à
la poubelle, avant même d’arriver au ministère de la
justice.
Je suis au regret de constater que
non seulement, vous avez accepté de l’exécuter mais vous avez offert à
l’occupant l’occasion de savourer une double victoire,
puisque vous lui avez permis de venir faire lui-même dans la partie
non occupée, en l’occurrence ANJOUAN, l’enquête judiciaire, se
substituant ainsi au juge comorien.
M.BOEHRER, en effet, après une
mission exploratoire qui s’est déroulée dans votre ministère dans des
conditions qui l’ont surpris lui-même, revient en force avec
« trois enquêteurs » , entendez trois policiers pour faire l a police dans la zone libérée. Il s’agit
de :
1. Gilles REY, capitaine, commandant de la section des Recherches de Pamandzi
2. Thomas SHNEIDER, maréchal des logis-chef à la Section des Recherches de Pamandzi
3. Olivier PERRAN, adjudant au Groupement d’Intervention Régional de Mayotte
En langage clair cela a un nom : faire entrer les loups dans la bergerie !
Il ne fait aucun doute que tous les
dégâts quels qu’ils soient, matériels juridiques, humains, que ces loups
pourraient causer, relèveraient entièrement de votre
responsabilité.
je crois savoir que le juge
d’instruction comorien spécialement chargé de servir de couverture à
l’opération a été nommé par… décret présidentiel (!!!) doyen des
juges d’instruction. Dois-je rappeler que la nomination du doyen des
juges est une simple mesure administrative relevant de la compétence du
président du Tribunal et qu’il est pour le moins
curieux qu’on ait voulu enlever d’en haut cette prérogative à ce
magistrat ? ?
Comme je comprends les jeunes qui ont refusé de salir leur robe neuve en participant à cette mascarade !
Je n’aborde pas dans cette lettre les
aspects juridiques de cette commission rogatoire suis generis, qu’on ne
peut trouver nulle part ailleurs dans le monde, mais
je suis prêt à les exposer et à les expliquer « partout où besoin sera » selon la formule bien connue des auteurs de décrets.
je me permettrai simplement de vous
rappeler que cela fait 38 ans que les Comores se sont libérées
(partiellement, hélas !) de la colonisation française et
qu’il n’est plus possible de continuer à ignorer le peuple comorien
en agissant en son nom sans le consulter, sans consulter sa
représentation nationale,
le Gouvernement de l’Union est responsable devant le peuple et c’est seulement ce peuple qui peut lui donner des ordres.
Dans sa lettre du 30 janvier 2013 l’Ambassadeur de France auprès de l’Union des Comores « prie
le Ministère des relations
extérieures de bien vouloir remercier d’ores et déjà les autorités
judiciaires comoriennes pour leur disponibilité, leur diligence, et leur
indispensable collaboration dans la conduite de ce
dossier sensible. »
C’est, à peine édulcoré par la fausse courtoisie diplomatique, le « nandodje » de Baumer ou de L. Humblot.
Le peuple comorien ne peut pas
accepter qu’un colonisateur sans vergogne donne l’ordre aux ministres du
gouvernement comorien de piétiner le drapeau, la
constitution et la législation de l’Union des Comores…… Jamais ! Et
l’Histoire qui n’oublie rien s’en souviendra !
Vous devez des explications au peuple de votre pays et c’est pour cela que j’ai décidé de vous adresser une lettre ouverte. Les citoyens comoriens partout
dans le monde vous regardent et vous écoutent.
Ali ABDOU ELANIOU
(Source : masiwamane, le blog de ELANIOU )
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Tout commentaire diffamatoire ou qui ne respecte pas les règles élémentaires de politesse ne sera pas mis en ligne