samedi 13 juillet 2013

AZALI ASSOUMANI : LA TRAHISON.

RAPPELONS-NOUS cet article de KASHKAZI ! Nous sommes en 2005. Alors qu'une Résolution de l'ex OUA interdit depuis 20 ans l'accueil de MAYOTTE en tant qu'entité séparée de l'ensemble de l'Etat comorien, le colonel-putchiste AZALI Assoumani décide de "dépolitiser" le différend politique sur cette île.
   Si ce n'est pas de la HAUTE TRAHISON, c'est quoi ?

DÉPOLITISER LE DÉBAT. DANS SON ALLOCUTION TANT DÉCRIÉE ILYA QUINZE JOURS.

 A Beït Salam, le président Azali avait utilisé l'expression. "Nous nous sommes mis d'accord pour que le débat sur la participation des jeunes mahorais aux Jeux des Îles soit dépolitisé", avait-il lancé, après avoir jeté un froid dans l'assistance en annonçant qu'"après de multiples discussions, nous avons accepté d'examiner favorablement la participation des jeunes mahorais aux Jeux des Îles de l'océan Indien".
Dépolitiser le débat, c'est également ce que demande l'ambassadeur de France aux Comores, Christian Job : "Je salue le réalisme (du président Azali, ndlr) et la disjonction entre la politique et le sport, qui partout ailleurs dans le monde permet à l'ensemble des sportifs de se réunir, notamment à l'occasion des Jeux Olympiques", indiquait-il mardi. "Le sport ne doit pas être l'otage des opinions politiques". Dépolitiser le débat, c'est encore ce à quoi se sont attachés les hommes politiques mahorais en se félicitant de cette mesure. Bacar Ali Boto affirmait la semaine dernière (lire Kashkazi n°15) : "Nous sommes dans la zone, il est tout à fait normal que nous puissions y participer, puisqu'il ne s'agit pas de faire de la politique mais plutôt du sport."

MAIS DÉPOLITISER LE DÉBAT, C'EST CE À QUOI s'oppose farouchement la grande majorité des partis politiques comoriens, et avec eux les radios locales et une grande partie de la population. Car pour ceux-là, le sport est politique. "Ce n'est pas que du sport cette affaire !" s'indigne Youssouf Moussa, le leader du Front démocratique (FD). Pour lui, "cette démarche est avant tout politique.
Mansour Kamardine l'a d'ailleurs dit". La semaine dernière, le député mahorais avait déclaré qu'il s'agissait d'"un résultat spectaculaire" pour "la diplomatie française". "Avant", continue Youssouf Moussa, "les sportifs mahorais étaient avec la Réunion, donc si ça n'avait été que du sport, ça n'aurait pas été un problème, ils seraient restés avec les Réunionnais. Mais nous sommes là dans la politique". Selon le vieux militant, "c'est une première étape pour la reconnaissance de l'entité mahoraise" qui en amènera d'autres. Un sentiment partagé par une grande partie de la classe politique... Le Congrès national pour l'alternative (CNA), basé à Moroni, estime ainsi que le président vient "d'apporter le coup de grâce à la question de l'Ile comorienne de Mayotte, en autorisant les jeunes de cette île soeur, à participer en tant "qu'entité" aux prochains jeux de l'océan Indien. Le cadre de dialogue mis en place par le Gouvernement de l'Union, marque une véritable démission dans la revendication de l'intégration de Mayotte dans le giron national. Trahison ou Realpolitik ?", interroge un communiqué de ce mouvement, qui "appelle les fédérations sportives comoriennes ainsi que tous les athlètes, à faire preuve de patriotisme en s'abstenant de participer aux prochains jeux de l'océan Indien". Il lance aussi "un vibrant appel aux pays amis et voisins de l'océan Indien d'empêcher le sacrifice de la quatrième île comorienne".


 SAMEDI, À L'ASSEMBLÉE, ALORS QUE LES ÉLUS VENAIENT DE VOTER une résolution faisant du 12 novembre une journée pour la réintégration de Maore dans l'ensemble comorien, on ne parlait que de ça. Au point d'oublier l'autre grand tabou levé par le président : son incapacité, selon lui, à organiser les élections à Ndzuani. Dans la rue, sur les ondes, le constat est le même. "La population est choquée, scandalisée. Beaucoup de gens nous interpellent, nous posent des questions dans la rue", affirme Nourdine Abdallah, du FD. "Azali a donné Mayotte à la France sans demander à personne", constate pour sa part Farid, un jeune homme venu assister à la cérémonie du 12 novembre.
Egalement présent à cette journée, Rushdy, du quartier Caltex à Moroni, indique que “les jeunes du quartier n'acceptent pas. On a beau leur dire qu'il s'agit de sport, mais eux ne voient que le côté politique des choses”. Abdallah, lui, avoue “avoir été déçu, car même si c'est bien pour les jeunes sportifs, d'un point de vue diplomatique c'est un échec.” Ce qui choque les gens, ce n'est pas que les élections puissent ne pas avoir lieu, c'est que Maore puisse exister en tant qu'entité, même sportivement. Et pour cause, analyse un observateur de la scène politique, "cette question est intrinsèque au Comorien. Depuis trente ans, personne n'a osé reculer. Pour la première fois, un président lâche du lest". Pour Youssouf Moussa, ce tollé populaire s'explique par le fait que "la participation de Mayotte aux Jeux est un sujet récurrent. C'est une épine présente en chacun des Comoriens.
C'est un problème qui touche tout le monde, ce d'autant plus que les derniers événements à Mayotte ont braqué tous les regards vers cette île", et ont ramené le peuple comorien à la dure réalité : Maore est chaque jour plus proche de la France que la veille. "Or c'est une question vitale. Plus de 80% de la population mahoraise a de la famille dans les autres îles. Moi, je suis de père mahorais et de mère anjouanaise."
Mais ce qui inquiète encore plus la rue, c'est qu'elle ne comprend pas pourquoi Azali a lâché du lest. Pourquoi ? et surtout pourquoi aujourd'hui, à 6 mois de la fin de son mandat ? M.Kamardine, en parlant de succès diplomatique, a esquissé le début d'une explication.
 Christian Job renchérit : "Cela marque la reprise des relations franco-comoriennes qui ont commencé avec la rencontre entre le président Azali et le président Chirac en février 2005, et qui se sont poursuivies avec les conclusions de la commission mixte franco-comorienne, en mars." "Pour matérialiser cette évolution", continue M. Job, "la France a proposé aux autorités comoriennes l'organisation d'une coupe de la concorde inter-îles en 2006 qui rassemblerait les quatre clubs champions des quatre îles". Autrement dit, la coopération sportive, depuis longtemps au point mort, pourrait reprendre rapidement entre Maore et ses soeurs.


 LES OBSERVATEURS RESTENT TOUTEFOIS PERPLEXES.


Pour eux, ce donnant-donnant n'explique pas la "trahison" -un terme du FD- d'Azali. Selon Youssouf Moussa, cela va bien plus loin. "Le gouvernement a démissionné sur cette question", déclarait-il samedi. "Déjà, lors de la Commission mixte franco-comorienne de mars 2005, Azali avait lâché. Puis lors de la dernière Assemblée générale de l'ONU, il n'a pas réclamé le retour de Mayotte dans le giron comorien, alors que c'était le cas depuis trente ans, sous prétexte qu'il y aurait bientôt un règlement de la solution, alors que la France durcit sa position !" Conclusion du militant : "Il se murmure, ici et là, qu'Azali lâcherait Mayotte en échange d'un soutien de la France pour qu'il reste au pouvoir après 2006." Une hypothèse qui convainc nombre d'opposants (lire p.10), qui ont toutefois tendance à oublier la déclaration du même Azali en février dernier : “Celui qui bradera Mayotte n'est pas encore né.”

SELON UN JOURNALISTE QUI SUIT LA POLITIQUE DEPUIS des années, cette hypothèse n'a d'ailleurs aucun sens. "Je ne pense pas qu'Azali fasse ça pour rester au pouvoir. Mais je ne pense pas non plus qu'il accepte de lâcher Mayotte. C'est juste une manière d'améliorer les rapports avec la France. Une sorte de clin d'oeil à la France. Pourquoi si tard ? Je ne sais pas... Après tout, ce n'est que du sport", finit-il. Un sport qui, dans le passé, a su rassembler les peuples au-delà des conflits entre Etats - on se souvient d'un match de foot USA-Iran dans les années 90. Mais qui a également été le vecteur de messages politiques. En 1980, les Etats-Unis boycottaient les JO de Moscou en raison de la guerre de l'URSS en Afghanistan. Auparavant, les athlètes noirs américains avaient défendu leur cause sur les podiums (des stades).


Source : Kashkazi 16 du jeudi 17 novembre 2005

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